Mannequin vivant
FOR SICKY MAGAZINE @sickymag
Dans l’imaginaire collectif, les mannequins incarnent un idéal presque irréel : des corps impeccables, des visages sublimés par la lumière, une vie hors du commun. Figures d’admiration et d’inaccessibilité, elles semblent évoluer dans un univers figé dans la perfection. Mais derrière cette façade soigneusement construite se cache une réalité plus brute, plus humaine, faite d’instants ordinaires que l’on ne montre jamais.
Sur les shootings de mode, j’ai souvent remarqué un phénomène troublant : les mannequins sont là, au centre de l’image, et pourtant, elles restent en marge de l’équipe. Personne ne leur parle vraiment. Elles attendent, silencieuses, comme si elles étaient à part, comme si elles évoluaient dans une autre réalité. Pourtant, elles font autant partie du shooting que le maquilleur, le coiffeur ou le technicien lumière. Mais autour d’elles, il y a souvent comme une glace invisible, une barrière qui les éloigne du reste du monde.
C’est cette distance que j’ai voulu briser à travers cette série. J’ai voulu les rendre plus accessibles, les voir comme des êtres humains avant d’être des icônes. Montrer ce qu’on ne voit jamais : une mannequin qui nettoie son appartement, qui cuisine, qui s’épile maladroitement, qui subit la douleur de ses règles, qui sort ses poubelles. Ces scènes d’apparence banale rappellent une chose essentielle : derrière chaque image figée, il y a une personne vivante, avec ses failles, ses habitudes, ses émotions.
Visuellement, le projet joue sur la tension entre l’idéalisation et la banalité. L’alternance entre des cadrages léchés, dignes d’un éditorial de mode, et des détails crus du quotidien crée un contraste fort, interrogeant notre perception de la beauté et de la mise en scène. Ce décalage souligne combien notre regard est façonné par des images construites et combien celles-ci influencent notre vision du réel.
Cette série est aussi une réflexion sur les injonctions à la perfection et sur l’écart entre l’image projetée et l’identité véritable. Derrière chaque cliché, derrière chaque posture maîtrisée, il y a une personne qui existe au-delà du cadre. Ici, l’image de mode ne fige plus, elle libère.
Gwendoline Franco @gwendolinefranco
model. Louise @loumend @girlmgmt hair. Victor Rossi @victorlecomte_
make up. Clotilde Puvis de Chavannes @paintyourlips
light designer. Mathieu Lescop @mattlescop























